Présenté à la Berlinale en février ainsi qu’à la dernière édition de l’Étrange Festival en septembre dernier, Invasion, le troisième long métrage de Shahram Mokri sort en salle ce mercredi 24 octobre.

Comme pour Le Poisson et le Chat (2013), son film précédent, ce nouvel opus se présente sous la forme d’un unique plan-séquence qui mêle plusieurs temps : le passé, le présent et l’avenir. Situé dans un Iran post-apocalyptique où les ténèbres règnent depuis trois ans et où une partie de la terre est privée de soleil, le film a pour décor un stade où un groupe d’enquêteurs cherche à reconstituer le meurtre de Saman par Ali. Le principal suspect est convoqué ainsi que ses coéquipiers mais aussi la soeur jumelle de Saman, Negar. Cette présence nouvelle que les garçons découvrent, à commencer par Ali, bouleverse leurs relations. Si le jeune homme pense rencontrer Negar pour la première fois, celle-ci n’hésite pas à lui avouer qu’elle le connaît déjà et qu’elle s’est fait passer à plusieurs reprises pour Saman auprès de lui. La complicité que le suspect pensait avoir nouée avec la victime le rattacherait en fait à sa soeur.

Si la caméra accompagne Ali dans ses déplacements, elle peut aussi bien le devancer que le suivre. Dans un jeu de lignes sinueuses – à l’image du serpent qu’Ali porte tatoué sur son dos – Shahram Mokri reprend certaines scènes sous un angle différents. Il nous révèle ainsi le hors-champs d’actions vues précédemment, actions de la reconstitution ou de l’événement premier. Loin d’un jeu formel, il s’agit d’un parcours intérieur pour Ali : un labyrinthe où le jeune homme doit reconstituer son histoire avec Saman et Negar pour démêler l’écheveau de ses sentiments. Au-delà de la prouesse technique, Invasion est une réflexion sur la répétition nécessaire avant de trouver le chemin vers le nouveau. Traversé par les vers de Rûmi et l’image du Phoenix, le film est une oeuvre poétique et philosophique d’une grande maîtrise. Il s’agit sans conteste d’un des plus beaux films de cette rentrée. À voir absolument!