À partir de quel moment les idéaux de liberté se perdent ? Quelle fatalité s’acharne sur les révolutions pour les vouer à l’échec ? C’est à ces questions que tente de répondre à sa façon le nouveau film de Mohsen Makhmalbaf.
Le Président commence au son du Beau Danube bleu. Un travelling nous montre les décorations lumineuses qui ornent la capitale d’un pays imaginaire. Sur les hauteurs, un homme et son petit-fils contemplent le spectacle. Comme pour affirmer son pouvoir, à la manière d’un caprice d’enfant, le président ordonne que les lumières s’éteignent. Si l’effet éblouit l’enfant, bientôt, il ne se reproduira plus. L’homme vient de perdre son pouvoir. Commence une longue fuite, véritable voyage d’apprentissage pour l’enfant comme pour son grand-père.
En effet, l’homme et son petit-fils décident de se fondre dans la masse. L’ancien président va ainsi découvrir le véritable visage de son peuple. Le film multiplie les face à face entre lui et ses concitoyens comme des moments de vérité. Ainsi ce coiffeur qui pourrait être son double mais reste docile et n’est pas animé des mêmes sentiments que lui. Ou plus tard, Maria, l’amour de jeunesse, aux pieds duquel se retrouve le président. L’homme semble remonter le temps comme pour comprendre d’où il vient. À son tour, l’enfant découvre une réalité qu’il ignorait.
Le départ du tyran, les émeutes de la foule, les scènes d’exaction de l’armée, le film parvient à reconstituer des images marquantes et familières. Tandis que la tête du président est mise à prix, une question se pose : qui représente un danger pour le peuple, ce vieil homme qui n’est plus rien ou les miliciens qui exécutent, violent ou pillent ?
Celui qui signait l’arrêt de mort des prisonniers se retrouve avec eux sur la route. Le film nous montre le lien qui unit chaque personne au sein d’une communauté.
Le discours de Makhmalbaf peut paraître idéaliste, le cinéaste a cependant conscience de la violence de son personnage comme de la situation mais il veut croire dans les leçons du passé. Une révolution ne se fera que si les mentalités évoluent.
En ce sens, Le Président est le récit d’une éducation démocratique. L’enfant sera peut-être un jour président, mais autrement, rallumant les lumières non par caprice mais pour une bonne raison !
Bamchade Pourvali