La sortie en salle de Careless Crime de Shahram Mokri est l’un des événements cinématographiques incontournables de ce mois de novembre 2021 et l’une des plus fascinantes expériences cinématographiques qui soient !
À travers ce quatrième long métrage, le cinéaste de Fish & Cat et d’Invasion met en relation le passé et le présent pour s’intéresser à la reconstitution d’un événement à travers un épisode marquant de la révolution iranienne : l’incendie du cinéma Rex d’Abadan, le 19 août 1978 provoquant la mort de 478 spectateurs pendant la projection du film Les Cerfs (Gavaznha, 1974) de Massoud Kimiaï avec Behrouz Vossoughi.
Attribué dans un premier temps à la SAVAK (la police politique du Shah), l’incendie est aujourd’hui reconnu comme l’oeuvre de religieux cherchant à déstabiliser le pays déjà agité par la contestation. L’événement ne pouvait que retenir l’attention du cinéaste. Mais Careless crime est tout autant une réflexion sur la société iranienne d’aujourd’hui à travers sa jeunesse. Le film se déplace ainsi avec fluidité entre le passé et le présent et pose différentes questions : qu’est-ce que voir un film lorsque celui-ci est lié à un événement historique ? Quelle incidence a le passé sur le présent ?
S’il évoque la révolution iranienne, Careless Crime fait aussi référence aux guerres passées et présentes dans la région à travers un mystérieux obus qui pourrait dater de la guerre Iran-Irak (1980-1988) ou de la guerre civile en Syrie. Tous ces fils se rejoignent dans une tapisserie fabuleuse dont nous faisons partie en tant que spectateur. Le film peut évoquer parfois Once upon a time… in Hollywood (2018) de Quentin Tarantino dans son retour sur un événement dont les conséquences seront décisives. Une différence cependant concerne l’emploi de la fiction qui n’atténue pas ici la tragédie mais l’amplifie jusqu’à en faire un événement contemporain. Objet éblouissant et intrigant, Careless Crime illumine le firmament du cinéma contemporain.