C’est un sujet rarement abordé dans le cinéma iranien qu’évoque Negar Azarbayjani pour son premier long métrage, Une femme iranienne.
Faisant appel à des figures familières du cinéma contemporain en Iran, la réalisatrice interroge la question du transgenre dans un pays où la différence sexuelle est un absolu comme le montre le port obligatoire du voile pour les femmes. Si le transgenre, le refus des codes sexuels, est combattu en Iran, la transsexualité, autrement dit le changement de sexe physique, est, quant à elle, autorisée.
Bien que reconnue par le pouvoir, la transsexualité n’en constitue pas moins un tabou dans les familles iraniennes. C’est cette double contrainte que montre Une femme iranienne à travers le personnage d’Adineh. Celle-ci s’oppose à son père qui veut la marier de force pour l’empêcher de mener une vie en-dehors des lois qui régissent la société.
Le film brosse un double portrait de femme à travers la rencontre d’une chauffeuse de taxi, Rana, et d’Adineh, qui préfère être appelée Edi, diminutif de son prénom. Si Rana appartient à un milieu traditionnel, elle est amenée à vivre une vie autonome pour payer la dette de son mari emprisonné. L’autonomie est aussi ce que recherche Edi dans sa quête et son désir de quitter l’Iran.
Ces vies parallèles qui se croisent vont permettre à chacune de se découvrir au contact de l’autre. Le titre original : Des miroirs face à face traduit cette double réflexion. Le titre français Une femme iranienne évoque davantage des itinéraires autonomes propres aux deux personnages. Une des plus belles scènes du film est le double monologue des deux femmes sur une route qui se déploie devant elles. Chacune raconte sa propre histoire tout en ayant conscience de vivre un moment décisif. Les deux voix finissent par se confondre. C’est leur amitié qui parviendra à bouleverser le cours de l’histoire.
Dépasser les idées reçues, confronter des vies semblables et différentes, c’est ce pouvoir du cinéma que met en scène Une femme iranienne à travers la solidarité d’Edi et de Rana. La transformation du film concerne non seulement les personnages mais aussi le spectateur qui remet en cause ses préjugés et reste profondément marqué par la personnalité de Rana et plus encore par celle d’Edi, « une âme iranienne ».
Bamchade Pourvali